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Six des dizaines de tirailleurs exécutés par l’armée française en 1944, à Thiaroye près de Dakar, viennent d’être reconnus, à titre posthume « Morts pour la France ». Cette reconnaissance attribuée par la France, 80 ans après le massacre et qualifié de »geste mémoriel inédit » par des médias français a visiblement provoqué l’ire du premier ministre sénégalais Ousmane Sonko.
Cette attribution « Morts pour la France » a été délivrée en toute discrétion, le 18 juin, par l’Office national des combattants et des victimes de guerre (ONaCVG), une structure rattachée au ministère français des armées. À y voir de près, la décision a été actée à deux jours de la première rencontre, à Paris, entre le président de la République du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, et son homologue français, Emmanuel Macron. Est-ce une pure coïncidence ? Difficile de le dire. Cependant, selon le secrétariat d’Etat français chargé des Anciens combattants et de la Mémoire, « ce geste s’inscrit dans le cadre des commémorations des 80 ans de la libération de la France comme dans la perspective du 80e anniversaire des évènements de Thiaroye, dans la droite ligne mémorielle du président de la République (Emmanuel Macron) qui souhaite que nous regardions notre histoire +en face+ ». La reconnaissance concerne « quatre tirailleurs originaires du Sénégal, un de Côte d’Ivoire et un de la Haute volta (Burkina Faso) ». Et selon le secrétariat d’État , cette première décision « pourra être complétée dès lors que l’identité exacte d’autres victimes aura pu être établie ».
« …les temps ont changé (…) Je tiens à rappeler à la France qu’elle ne pourra plus…»
Dans un post sur sa page Facebook, le premier ministre sénégalais et président du parti Pastef-Les-Patriotes, Ousmane Sonko a réagi à la décision prise par la France au profit des »tirailleurs sénégalais ». Il demande au gouvernement français « de revoir ses méthodes, car les temps ont changé ! ». Il poursuit : « D’aucuns ont salué comme une grande avancée la décision des autorités françaises d’accorder leur « reconnaissance » à six des soldats africains froidement abattus en 1944 au camp de Thiaroye par l’armée française. Une reconnaissance qui consiste à leur attribuer, à titre posthume, l’étiquette « mort pour la France » ». Et M. Sonko de s’interroger : « Pourquoi cette subite « prise de conscience » alors que le Sénégal s’apprête à donner un nouveau sens à ce douloureux souvenir, avec la célébration du 80e anniversaire cette année ? » Le premier ministre sénégalais sur ton menaçant, ajoute : « Je tiens à rappeler à la France qu’elle ne pourra plus ni faire ni conter seule ce bout d’histoire tragique. Ce n’est pas à elle de fixer unilatéralement le nombre d’Africains trahis et assassinés après avoir contribué à la sauver, ni le type et la portée de la reconnaissance et des réparations qu’ils méritent ». Et de conclure : « Thiaroye 44, comme tout le reste, sera remémoré autrement désormais.»